jeudi 24 avril 2014

Comment transformer un peintre en plat populaire



La comtesse Amalia Mocenigo écoutait scrupuleusement les directives de son médecin qui un jour lui interdit de manger de la viande cuite (on se demande pourquoi, mais c'est une autre histoire). Au Harri's Bar de Venise, le chef appelé Cipriani et prénommé Giuseppe (dit l'histoire) conçut pour elle un plat de fines tranches de boeuf assaisonnées d'huile d'olive, de sel, de poivre et de jus de citron, ce qui leur donne une couleur d'un rouge très proche de celui qu'on observe dans les peintures de Vittore Carpaccio, peintre vénitien que je n'ai appris à connaître que grâce au plat et aussi aux textes de Michel Serres.
Est-ce un hasard si cette année-là était organisée une grande exposition Carpaccio ?
Le narrateur de cette histoire ("si no e vero...") n'est autre que le fils de Giuseppe, Arrigo Cipriani qui a succédé à son papa à la tête du Harri's bar.

La peinture qui aurait retenu l'attention de papa Cipriani est "Le triomphe de St Georges". Jugez vous-mêmes. J'ai vu plus convaincant, mais dans un livre.


Inutile d'ajouter qu'il est arrivé malheur au l'invention de Giuseppe Cipriani ; on appelle carpaccio n'importe quelle crudité en tranches fines de l'huile d'olive ; la couleur n'a plus d'importance. Pourtant bien d'autres peintres mériteraient d'entrer dans l'immortalité par la cuisine mais voilà, il faudrait inventer le plat dans la ville où il (elle) est exposé(e) et trouver un lien entre le plat et le peintre, ce qui demande du talent et un sens de l'à propos.

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