Louis-Nicolas Davout (1770 - 1823)
Le «Maréchal
de fer»
Louis-Nicolas Davout, duc
d'Auerstaedt et prince d'Eckmühl, apparaît, au vu de ses succès, comme un des
plus grands maréchaux de l'Empire, mais également un des plus brillants chefs
de guerre de l'histoire militaire française. Animé par le sens de la fidélité
et de l'honneur, ce grand tacticien, soucieux d'imposer une discipline de fer à
ses hommes, a su s'imposer aux yeux de Napoléon comme un de ses officiers
favoris.
Benjamin
Fayet
Un officier
intransigeant
Le futur maréchal Davout voit le
jour dans un petit village de l'Yonne, le 10 mai 1770. Issu d'une vielle
famille aristocratique bourguignonne, le future maréchal intègre l'école
militaire d'Auxerre avant de poursuivre ses études à Paris. Il les termine à la
veille de la Révolution, en 1788, et intègre le Royal-Champagne-Cavalerie en
tant que sous-lieutenant.
La Révolution éclate alors et le
jeune officier épouse totalement les idées nouvelles, devenant même un
admirateur des révolutionnaires les plus extrémistes, comme Saint Just ou
Hébert. Il supprime la particule de son nom et se fait remarquer par son
hostilité à l'autorité royale. Cet officier révolutionnaire est mis aux arrêts
pour avoir refusé de porter un toast en l'honneur au roi. Peu après, lors d'une
mutinerie, il en vient même à soutenir les mutins contre sa propre hiérarchie
militaire.
Après sa démission de l'armée, il
est pourtant élu lieutenant-colonel au 3ème bataillon des volontaires de
l'Yonne. Il s'illustre alors dans l'armée du Nord sous le commandement du futur
général félon Dumouriez qu'il tentera plus tard de faire arrêter lors de son
passage à l'ennemi en 1793.
À cette date, Davout est nommé
général de division, poste qu'il refuse s'estimant trop inexpérimenté pour
occuper une telle fonction. Entre 1794 et 1797, le jeune général s'illustre par
son sens tactique et sa capacité de commandement au sein de l'armée du Rhin. Au
cours de ces années, il se lie d'amitié avec le général Desaix, un proche de Bonaparte, qui le lui présente en 1798.
La gloire à
travers l'Europe
Conscient de sa qualité, Bonaparte
l'envoie à Toulon pour préparer l'expédition d'Égypte. Comme à son habitude, il
s'illustre lors des campagnes égyptiennes et contribue de façon décisive à la
victoire d'Aboukir.
À son retour en France en 1800,
Bonaparte le nomme commandant de la cavalerie de l'armée d'Italie. Durant le
Consulat, il sera successivement nommé inspecteur général de la cavalerie puis
commandant des grenadiers à pied de la Garde consulaire. Davout apparaît comme
l'un des plus brillants officiers de l'armée française. Pour cette raison, il
fait partie de la première promotion des «Maréchaux d'Empire»
de 1804. Il a alors tout juste trente-quatre ans et les multiples campagnes de
l'Empire vont lui offrir l'opportunité de se créer une réputation qui lui
vaudra d'être appelé le «Maréchal de fer».
À la fin de l'année 1805, l'Autriche
et la Russie s'arment et déclarent la guerre au tout nouvel Empire français.
Napoléon se porte au devant des armées austro-russes et décide de les affronter
directement sur leur terrain. Davout prend le commandement du 3ème corps de la
Grande Armée et participe brillamment aux victoires mémorables d'Ulm et d'Austerlitz. Lors de cette dernière bataille, il
est appelé par Napoléon à le rejoindre alors que son corps d'armée est à plus
de 150 km du centre des opérations. Pour aller au secours de l'Empereur, il
réussit à faire parcourir cette distance à ses hommes en moins de 36 heures et
contribue à la gloire des armées françaises lors de la «bataille des trois
empereurs».
Son plus beau coup d'éclat, il le
doit à la campagne de 1806 contre la Prusse. Avec un corps d'armée en
infériorité numérique, il culbute les forces prussiennes à la bataille d'Auerstaedt, le 14 octobre 1806. Napoléon peut
grâce à cette victoire concentrer ses troupes sur le reste de l'armée
prussienne, battue à Iéna le même jour. En récompense de ce fait d'armes,
Davout obtiendra l'autorisation d'entrer le premier dans Berlin avec son corps
d'armée et sera par la suite fait duc d'Auerstaedt en 1808.
Lors de l'année 1807, il continue à
servir avec succès l'Empereur en commandant l'aile droite face aux Russes à la
bataille d'Eylau. Durant cette terrible bataille, il s'écrie
pour donner de l'ardeur à ses hommes : «Les braves mourront ici, les lâches
iront mourir en Sibérie !» À la fin de cette nouvelle campagne militaire,
Napoléon le nomme gouverneur général du grand duché de Varsovie, poste
stratégique à la tête de ce duché allié de la France et au centre des appétits
de la Prusse, de l'Autriche et de la Russie. Il dirige le duché avec une grande
fermeté et s'attire malgré tout la sympathie du peuple polonais qui voit en lui
un protecteur, capable de défendre leur nation.
Les années se suivent et se
ressemblent pour un empire constamment en guerre, offrant à Davout de
nombreuses occasions de s'illustrer. L'année 1809 voit l'Autriche rentré en
guerre contre la France. Davout et son 3ème corps combattent victorieusement à
la bataille d'Eckmühl , le 23 avril 1809 (cette bataille lui vaudra le titre de
prince d'Eckmühl). Il sera absent lors de la bataille d'Essling mais
participera activement à la victoire de Wagram où il commandera encore une fois
l'aile droite.
Honneur et
discipline
La paix recouvrée, Davout est fait
commandant en chef de l'armée d'Allemagne le 1er janvier 1810, avant de
s'occuper de la mise en place du blocus continental sur les villes hanséatiques
où il combat avec sévérité la contrebande, sévissant dans beaucoup de villes
allemandes.
Après deux années de paix relatives
(la guerre en Espagne occupe toujours une bonne partie de l'armée), Napoléon
prépare la guerre contre La Russie qu'il accuse de jouer double jeu et de servir
les intérêts britanniques. Toujours au premier plan, Davout, au cours de cette
funeste campagne de Russie, commande le 1er corps, fort de plus de 70 000
hommes.
La campagne commence difficilement
pour lui. Malgré sa réputation d'homme de fer, il pleure longuement durant
cette campagne la perte de son général de division Gudin auquel il était
particulièrement attaché. Ses troupes apparaissent comme un modèle de
discipline aux yeux du reste de l'armée selon le témoignage du comte de Ségur :
«Dans cette masse, le 1er corps formé par Davout se distinguait par l'ordre
et l'ensemble qui régnaient dans ses divisions. L'exacte tenue de ses soldats,
le soin avec lequel ils étaient approvisionnés, (...) enfin la force de ces
divisions, heureux résultat de cette sévère discipline, tout les faisant
reconnaître et citer au milieu de l'armée.»
Ses troupes entrent dans Moscou
après que Le maréchal se soit illustré à la bataille de la Moskowa, où son
cheval meurt sous lui tué par l'ennemi. L'hiver survient peu après et la
fameuse retraite de Russie commence : Davout et ses hommes sont placés à
l'arrière garde pour contenir les assauts ennemis.
Face à une France en position de
faiblesse, l'ensemble de l'Europe se coalise et lui déclare la guerre en 1813.
Davout est alors en première garde. Il est chargé de défendre Hambourg qu'il
réussit à tenir jusqu'à l'abdication de Napoléon en 1814. Contrairement à de
nombreux maréchaux, il ne prête pas serment à Louis XVIII. Tout naturellement
en 1815, l'Empereur de retour de l'ile d'Elbe souhaite lui faire reprendre du
service.
Napoléon veut en faire son ministre
de la guerre, poste que le maréchal refuse tout d'abord. Afin de le convaincre,
l'Empereur lui déclare : «Je suis seul, seul en face de l'Europe ; voilà ma
situation. Voulez vous m'abandonner ?» Davout, ému, lui répond : « Sire,
je n'ai qu'une réponse à faire. J'accepte le ministère. » Il développe un
véritable zèle à cette fonction et réussit en seulement quelques semaines à
créer une armée, défaite ensuite dans la «morne plaine» de Waterloo.
Le 3 juillet 1815, il signe
l'armistice et se soumet à l'autorité royale le 14 juillet. En homme d'honneur,
il prend la défense d'un certains nombre de généraux proscrits et demande le
remplacement de leurs noms par le sien, étant donné que ceux-ci n'ont fait que
suivre ses ordres. Fidèle à son code de l'honneur, Il prendra également la
défense du maréchal Ney accusé de trahison et condamné à mort par un tribunal
militaire. Louis-Nicolas Davout meurt le 1er juin 1823, date de fin d'un destin
militaire hors du commun, celui d'un des plus grands chefs de guerre que la
France ait connu, seul maréchal resté invaincu tout au long de l'Empire.
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