samedi 28 septembre 2013

ab amentibus discipulis libera nos Domine



Jeune, en Amazonie, la cigarette aux lèvres, ce qui est un gros péché (d'anachronisme de ma part).

Il paraît qu'il n'avait pas d'humour mais ses travaux ont disqualifié le racisme et les idées de race inférieures (du marquis de Gobineau) et de peuples primitifs (de Lévi-Bruhl) et il a donné essor à l'ethnologie qui n'était en France qu'à ses balbutiements.
Témoin cette citation tirée de son introduction à un ouvrage 


«Toute culture peut être considérée comme un ensemble de systèmes symboliques au premier rang desquels se placent le langage, les règles matrimoniales, les rapports économiques, l'art, la science, la religion. Tous ces systèmes visent à exprimer certains aspects de la réalité physique et de la réalité sociale, et plus encore, les relations que ces deux types de réalité entretiennent entre eux et que les systèmes symboliques eux-mêmes entretiennent les uns avec les autres».

Moins jeune mais en couleur et sans cigarette ! Au moins il aura appris ça !
Ceci dit, la cigarette ne tue pas, ou alors après 100 ans, car M. Lévi-Strauss nous a quittés à plus de 100 ans ; assez pessimiste car pour lui la population du globe était la principale menace sur notre avenir. Si vous voulez mon avis, il aurait mieux fait de continuer à fumer !


M. Lévi-Strauss que ses suiveurs ont affublé du titre de "pape du structuralisme" a moins pâti de ses travaux que de la bêtise de ses épigones. Comme tous les grands penseurs, d'ailleurs.

D'où le titre de ce blog "De disciples sans cervelle délivre-nous, Seigneur !"

mercredi 25 septembre 2013

Nihil novi sub sole

Traduction: "Rien de neuf sous le soleil" (Ecclésiaste)

Longue citation de Charles Péguy, cité par Alain Finkielkraut:
"C'est le jeu ordinaire des journalistes que d'ameuter toutes les libertés, toutes les licences, toutes les révoltes et, en effet, toutes les autorités gouvernementales officielles. "Nous, simples citoyens", vont-ils répétant. Ils veulent ainsi cumuler tous les privilèges de l'autorité avec tous les droits de la liberté."
(in : Sauver l'innocence et le secret, Le Monde, 18/09/1998)

citation de

Blaise Pascal
"Ma place au soleil, l'usurpation de toute la terre."
(cité par Emmanuel Levinas)


vendredi 20 septembre 2013

Charybde et Scylla

LA VIEILLE ET LES DEUX SERVANTES

 Il était une Vieille ayant deux Chambrières.
 Elles filaient si bien que les Soeurs Filandières (1)
 Ne faisaient que brouiller au prix (2) de celles-ci.
 La Vieille n'avait point de plus pressant souci
 Que de distribuer aux Servantes leur tâche.
Dès que Téthis chassait Phébus aux crins dorés (3),
Tourets (4) entraient en jeu, fuseaux étaient tirés ;
            Deçà, delà, vous en aurez ;
            Point de cesse, point de relâche.
Dès que l'aurore, dis-je, en son char remontait,
Un misérable ccoq à point nommé chantait :
Aussitôt notre Vieille, encor plus misérable
S'affublait d'un jupon crasseux et détestable,
Allumait une lampe, et courait droit au lit
Où, de tout leur pouvoir, de tout leur appétit,
            Dormaient les deux pauvres servantes.
L'une entr'ouvrait un œil ; l'autre étendait un bras ;
             Et toutes deux, très mal contentes,
Disaient entre leurs dents : Maudit Coq tu mourras.
Comme elles l'avaient dit, la bête fut grippée (5);
Le Réveille-matin eut la gorge coupée.
Ce meurtre n'amenda nullement leur marché.
Notre Couple au contraire à peine était couché,
Que la Vieille, craignant de laisser passer l'heure,
Courait comme un Lutin par toute sa demeure.
            C'est ainsi que le plus souvent,
Quand on pense sortir d'une mauvaise affaire,
            On s'enfonce encor plus avant :
            Témoin ce Couple et son salaire.
La Vieille, au lieu du coq les fit tomber par là
            De Charybde en Scylla.



Le touret est le dévidoir du rouet, et par extension le rouet lui-même.
Les Filandières sont les Parques, nous y reviendrons.
Thétis est une divinité marine; quand elle chasse le soleil, que conduit Phébus, autrement dit Apollon, il est forcé de se lever : autrement dit, c'est le matin.

Du latin Incidet in Scyllam cupiens vitare Charybdim
ce qui signifie: il tomba en Scylla en essayant d'éviter Charybde.

Charybde était la fille de Poseidon (dieu de la mer) et Gaïa (déesse de la terre, comme chacun sait). Comme elle était perpétuellement affamée (boulimique mais à l'époque c'était un gros défaut et pas une maladie), elle n'avait pas pu s'empêcher de dévorer le bétail d'Héraclès, ce dont Zeus n'écoutant que son courroux, la punit en l'envoyant au fond d'un détroit, et son appétit avec elle.

PHOTO


Glaucos était bleu de la jolie nymphe Scylla ; comme elle le battait froid, il alla demander un philtre d'amour à la magicienne Circé, elle-même amoureuse de Glaucos ; elle profita de l'occasion pour lui donner un philtre... qui la changea en un monstre épouvantable.

PHOTO AUSSI

Charybde était d'un côté du détroit de Messine ; trois fois par jour elle créait un tourbillon et un gouffre qui aspirait les navires et en mangeait les occupants, puis vomissait l'eau avalée; Scylla était de l'autre côté et attendait ceux qui avaient échappé à Charybde.

LA PAIRE
(C'est pas fidèle mais c'est un peu moins moche !)

Charybde, le gouffre, ou Scylla, le récif,  c'est ce qu'on appelle un dilemme (un "double bind"); quoi qu'on fasse, c'est mal.

On a aussi fait de Charybde le symbole de la situation où suivant la décision prise, la moitié survit et l'autre meurt (ou l'inverse) tandis que Scylla représente le choix où c'est, pour tous, la vie ou la mort suivant l'option prise. Et de bien d'autres choses encore mais maintenant on ne cause plus comme ça.

L'expression existe dans de très nombreuses langues et souvent elle ne manque pas de sel.
Exemple du japonais :
前門の虎後門の狼,
ce qui signifie:
"à la porte de devant le tigre, à celle de derrière le loup."


Mauvais esprit

"Ce n'est pas tout de refuser la légion d'honneur,
encore faut-il ne l'avoir pas méritée." (Sacha Guitry, ou Pierre Dac, ou un autre esprit perçant)



car disait en substance Napoléon, qui l'avait créée, et qui connaissait le monde :
"c'est avec ce genre de babioles que l'on tient les  hommes."
Ceci dit, l'auteur de ce "blog" ne fait que citer des auteurs qui sont seuls responsables de leurs propse ; toutefois l'obligation que dictent la plus élémentaire probité, le sens de la justice (et la législation sur les droits d'auteur), m'amènent à citer mes sources et ainsi à rendre à chacun ce qui lui est dû.  

mercredi 18 septembre 2013

coup violent et pernicieux...

Aussi appelé improprement et fort injustement, du moins quant à son origine, "coup de Jarnac".

Jarnac, Agernacus pour les familiers d'Astérix, port fluvial, place forte et ville de la Saintonge, entre Angoulême et Cognac, sur la rive droite du fleuve Charente, département de la Charente, région Poitou-Charente; accessoirement lieu de la donation de la fondation François Mitterand et de sa dernière demeure.

Sous l'ancien régime Jarnac avait aussi ses seigneurs, et la noblesse avait le privilège rare de pouvoir régler ses différends par le duel.

Pour une affaire d'honneur conjugal, le seigneur de Jarnac, Guy de Chabot, provoqua en duel Henri II, fils de François 1er, et donc dauphin. 
François 1er interdit le duel pendant plusieurs années puis eut la mauvaise idée de DCD.
Le (nouveau) roi, Henri II, pressé de régler son compte au seigneur de Jarnac mais comme le duel lui était interdit en raison de ses responsabilités politiques, il se devait de désigner un remplaçant; ce qu'il fit en la personne du sire de la Chastaigneraie, François de Vivonne, réputé être une des fines lames du royaume.
Comme Guy de Chabot se savait inférieur à son adversaire, il se mit à l'étude et à la pratique d'une botte secrète avec un maître d'armes italien, jusqu'à la connaître le mieux possible.

Le duel eut lieu le 10/07/1547, sur la terrasse du château de Saint-Germain-en-Laye en présence du roi, de la cour et de nombreux spectateurs.



C'est là !

Le combat fut entamé avec rapidité, "à toute outrance" (à mort) et dès qu'il eut pris la mesure de son adversaire, le seigneur blessa son adversaire sous le genou une première puis une seconde fois. Considérant qu'il avait honneur perdu, La Chastaigneraie arracha ses pansements deux jours après et mourut d'hémorragie, sans que le roi ait même un regard pour lui car il considérait sa défaite comme une trahison.
Le seigneur de Jarnac fut donc reconnu sinon proclamé vainqueur.
Et le duel fut interdit.

A l'époque personne n'a songé à considérer cette attaque comme irrégulière, perfide ou sournoise.
Le dictionnaire de Furetières en 1727 le qualifiait de "coup mortel et imprévu."
Entretemps les descendants du seigneur de Jarnac eurent la malheureuse idée d'adhérer à la RPR (la Religion Prétendument Réformée, c'à d le protestantisme).
Le dictionnaire de Trévoux, oeuvre des Jésuites qui combattaient la Réforme, y ajoutèrent "ce prend toujours de mauvaise part." Intox avant la lettre.
Littré a d'ailleurs rétabli la vérité, en vain.

En réalité le coup de Jarnac est un coup de maître, une attaque ingénieuse ou particulièrement habile.

Je me suis longtemps demandé et j'ai demandé autour de moi où l'attaque avait pu être portée. Les réponses variaient : le tendon d'Achille (impossible), les tendons de l'arrière du genou (difficile), la cuisse (voir le dessin - possible car elle expliquerait la perte de sang par lésion de l'artère fémorale et le fait qu'il ait fallu s'y reprendre à deux fois) mais le plus probable est, à mon avis une section du tendon rotulien (c'à d sous la rotule) ce qui empêche de prendre appui sur la jambe avant, très fléchie lors des attaques en fente avant; d'ailleurs le texte parle d'attaque sous le genou.










L'honneur conjugal en question avait été mis en cause par Diane de Poitiers, maîtresse d' Henri II, et en rivalité constante avec la maîtresse de François Ier, la duchesse d'Etampes, qui était la belle-soeur du seigneur de Jarnac; c'est pourquoi François Ier qui connaissait ces rivalités de femmes jalouses, avait interdit le duel de son vivant.

and the winner is... (en anglais dans le texte)


Guy de Chabot, seigneur de Jarnac


"Oost west, thuis best" ou "de la nostalgie"

Si un royaume se trouvait à côté du mien et que les cris des coqs et des chiens s’entendissent de l’un à l’autre, mon peuple arriverait à la vieillesse et à la mort sans avoir visité le peuple voisin.
Tao Tö King - Ch 80

鄰國相望,雞犬之聲相聞,民至老死不相往來。
(pour les francophones, la même chose)

C'est la sagesse du "vieil enfant", en pinyin de Lao Zi (老子) et dans la version courante Lao Tseu, qui serait un personnage réel à moins qu'il ne soit légendaire. Son existence serait attestée par Sima Qian, l'Hérodote chinois, dont il a été question dans un blog précédent, mais à l'époque on racontait l'histoire dans des buts politiques, ce qui ne se fait depuis longtemps dans nos pays depuis que l'histoire est devenue une science.
Heureusement qu'on n'arrête pas le progrès.

On le représente toujours comme un très vieil homme aux lobes d'oreilles allongés, ce qui serait un signe de sagesse (en tout cas  plus présentable que de grandes oreilles), et monté sur un buffle.
Au fait pourquoi des lobes d'oreille allongés et pas une grande langue ou une grande bouche ? Etonnant, non ?


Pour les oreilles, c'est un peu raté mais le buffle et la barbe y sont.
C'est le père du taoïsme, et son dieu aussi. Et comme à tous les dieux, on ne s'est pas gêné pour lui faire dire beaucoup de c....


Ce petit article fait suite au poème de Joachim du Bellay déjà présenté dans un blog précédent, et repris ci-dessous.

Heureux qui, comme Ulysse, a fait un beau voyage
Ou comme celui-là qui conquit la Toison,
Et puis est retourné plein d'usage et raison,
Vivre entre ses parents le reste de son âge!

Quand reverrai-je, hélas, de mon petit village
Fumer la cheminée, et en quelle saison
Reverrai-je le clos de ma pauvre maison,
Qui m'est une province et beaucoup davantage?

Plus me plaît le séjour qu'ont bâti mes aïeux,
Que des palais romains le front audacieux,
Plus que le marbre dur me plaît l'ardoise fine.

Plus mon Loire gaulois que le Tibre latin,
Plus mon petit Liré que le mont Palatin,
Et plus que l'air marin la douceur angevine.

Joachim du Bellay (1522-1560)

NOTE: Liré c'est son village natal. Vous avez dit nostalgie ?


mardi 17 septembre 2013

Ἀνερρίφθω κύβος

En translittération: anerriftô kubos
Et en latin : alea jacta est (d'après Suétone)
et en prime : "franchir le Rubicon".

Expression connue, sans doute, mais de moins en moins employée.


Rome n'est pas loin du Rubicon, qui était donc la limite la frontière de l'Italie, dont le Sénat romain interdisait l'accès aux généraux accompagnés de leurs armées ; l'Italie était donc en quelque sorte l'îlot sacré, un peu comme le quadrilatère qui entoure le parc royal à Bruxelles est interdit aux manifestations.
Car à Rome comme partout ailleurs, il est interdit de s'en prendre aux institutions ou même d'en ouvrir la possibilité.

Ce petit fleuve côtier avait donc une grande importance symbolique; le franchir, c'était défier le Sénat, ce que Jules César a décidé de faire en -49, soit dix ans après l'édit du sénat qui protégeait l'Italie des coups d'états militaires.
En effet César était le proconsul chargé du gouvernement de la Gaule cisalpine, en qualité de quoi il avait "pacifié" la Gaule. Mais si César avait autorité dans sa province, à Rome c'étaient les magistrats - les consuls et les prêteurs- qui avaient le pouvoir. En franchissant le pont sur le Rubicon, César risquait sa tête et celle de ses hommes.

Une grande partie du sénat, les deux consuls et Pompée (le rival de César) prirent la fuite dès que la nouvelle fut connue. Pari gagné !

vous avez dit "démocrassie" ?

Les Grenouilles qui demandent un roi

Les grenouilles se lassant
De l'état démocratique, 
Par leurs clameurs firent tant 
Que Jupin les soumit au pouvoir monarchique.
Il leur tomba du ciel un roi tout pacifique: 
Ce roi fit toutefois un tel bruit en tombant,
Que la gent marécageuse, 
Gent fort sotte et fort peureuse, 
S'alla cacher sous les eaux, 
Dans les joncs, les roseaux, 

Dans les trous du marécage, 
Sans oser de longtemps regarder au visage 
Celui qu'elles croyaient être un géant nouveau. 
Or c'était un soliveau, 
De qui la gravité fit peur à la première 
Qui, de le voir s'aventurant, 
Osa bien quitter sa tanière. 
Elle approcha, mais en tremblant; 
Une autre la suivit, une autre en fit autant: 
Il en vint une fourmilière; 
Et leur troupe à la fin se rendit familière
Jusqu'à sauter sur l'épaule du roi.
Le bon sire le souffre et se tient toujours coi.
Jupin en a bientôt la cervelle rompue:
«Donnez-nous, dit ce peuple, un roi qui se remue.» 
Le monarque des dieux leur envoie une grue,
Qui les croque, qui les tue, 
Qui les gobe à son plaisir; 
Et grenouilles de se plaindre. 
Et Jupin de leur dire:« Eh quoi? votre désir
A ses lois croit-il nous astreindre? 
Vous avez dû premièrement
Garder votre gouvernement;
Mais, ne l'ayant pas fait, il vous devait suffire
Que votre premier roi fut débonnaire et doux
De celui-ci contentez-vous, 
De peur d'en rencontrer un pire.»

vendredi 13 septembre 2013

"Jeux de mains, jeux de vilains"

Toujours dans la rubrique "Notre si belle langue française qui est très supérieure à toutes les autres et a dominé le monde, surtout dans la diplomatie car enfin toute l'Europe parlait français au temps de Frédéric II de Prusse, et de Christine de Suède qui a même fait crever le pauvre Descartes, sans oublier la grande Catherine etc..." (air connu et ressassé ad nauseam)



L'Angleterre aurait inventé la plupart des sports modernes entre 1830 et 1880, dit-on.
Sauf bien sûr l'exception française : le jeu de paume qui était l'activité physique (sport aurait été un anachronisme) la plus pratiquée sous l'ancien régime, jusqu'à Louis XIV.
Le jeu de paume se jouait sur un carreau (c'est le nom du terrain qui lui était réservé), avec une raquette si on pouvait se la payer, avec la main si on n'était qu'un vilain, c'est à dire si on n'avait pas d'argent pour se la payer.
Au XVIIème siècle il n'y avait pas moins de 250 carreaux à Paris, dont 6 dans la seule rue Mazarine.
Une partie durait très longtemps : 2 à 3 heures, sans pause; c'est dire s'il fallait être robuste et endurant pour tenir la durée d'une partie.
On pouvait utiliser les murs pour y faire rebondir la balle (comme au squash).Toit incliné à mi-hauteur sur trois côtés, sur lequel il fallait faire rebondir la balle au service, une petite fenêtre sur un côté, un pilier... rebonds inattendus garantis.
Louis XIV qui était goutteux, n'y excellait pas, contrairement à ses prédécesseurs; ses courtisans se sont donc empressés de s'en détourner; ajoutez à cela la spéculation immobilière et sans doute la révolution française, et vous comprendrez pourquoi le jeu de paume a perdu la cote.
Quatre pays le pratiquent encore : l'Angleterre, l'Australie, les Etats-Unis et la France où sont organisés aujourd'hui les championnats de France et du monde (à Paris).



Le déclin du jeu de paume a d'ailleurs ironiquement commencé le 20 juin 1789 lors du "Serment du jeu de paume" prononcé dans la salle du même nom à Versailles, par lequel les députés du Tiers Etat (c' à d ni noblesse ni clergé, autrement dit : vous et moi) jurèrent de ne pas se séparer avant d'avoir rédigé une constitution ; ce serment a donné le branle à la future révolution française.


En voici le tableau que fait David qui fait dans l'officiel, avec un incontestable sens du mouvement et des ambiances.

mercredi 4 septembre 2013

Présentation de la Beauce à Notre-Dame de Chartres

Pour la beauté de la langue,
Pour la stature intellectuelle et morale de Charles Péguy,
Voici le début de son poème, à lire à mi-voix (ou plus si désiré)
« Étoile de la mer, voici la lourde nappe 
Et la profonde houle et l’océan des blés
Et la mouvante écume et nos greniers comblés,
Voici votre regard sur cette immense chape. 
Et voici votre voix sur cette lourde plaine 
Et nos amis absents et nos coeurs dépeuplés,
Voici le long de nous nos poings désassemblés
Et notre lassitude et notre force pleine.
Étoile du matin, inaccessible reine
Voici que nous marchons vers votre illustre cour,
Et voici le plateau de notre pauvre amour
Et voici l’océan de notre immense peine » (…).



Charles Péguy est mort en 1914, dès les premiers jours de la première guerre mondiale ; à l'époque les officiers se devaient de montrer plus de bravoure que leurs hommes en montant debout au front, ce qui a été son cas. Le commandement français s'est rapidement rendu compte de la stupidité de cet usage en voyant la quantité d'officiers qu'il lui coûtait. L'usage a par conséquent été abandonné. Un peu trop tard pour Péguy.



"qui avait déjà pas mal navigué" (variante sur un air connu)

Le Lusitania a été construit en Grande-Bretagne (en Ecosse) en 1904, ainsi que deux autres navires, le Mauretania et l'Aquitania. Lusitanie était le nom du Portugal du temps d'Astérix.



C'était un paquebot comme ses deux consoeurs (navire est en anglais du genre féminin), et le navire le plus rapide (et le plus gourmand) du monde, en raison de quoi il a reçu le Ruban Bleu, à deux reprises. Ce faisant il a détrôné le tenant du titre, le Kaiser Wilhelm II, qui détenait le record de vitesse depuis dix ans. Pour le luxe je vous laisse juges.



Sans doute le Kaiser ne lui a-t-il jamais pardonné car en 1915, en pleine première guerre mondiale, le navire a été coulé par un sous-marin allemand, au large de l'Irlande. Le croiseur britannique qui aurait dû le protéger, avait, semble-t-il, été retiré par l'amirauté et Winston Churchill.
Bilan : il varie suivant les sources ; sur environ 1200 personnes, 703 ont survécu. Il y aurait eu 128 morts américains sur 128 américains embarqués, dont le millionaire Alfred Gwynne Vanderbilt de la dynastie d'affaire Vanderbilt (d'origine hollandaise).
L'événement a contribué à l'entrée des Etats-Unis dans la guerre qui de toute façon avait déjà décidée en secret par le gouvernement US. Berlin a immédiatement décidé d'arrêter les attaques sous-marines mais comme les dés étaient jetés, les attaques ont repris en 1917, après le torpillage du Vigilentia en 1917.

Inutile de dire qu'on a tout de suite cherché un coupable et que l'amirauté a voulu faire porter le chapeau au capitaine qui n'aurait pas respecté les mesures de sécurité. Lord Morsey qui supervisait le procès, a rapidement refusé de collaborer à ce "damned dirty business".

En fait la torpille lancée sur le Lusitania n'a causé qu'une petite explosion, qui a été suivie d'une seconde, bien plus importante et inexpliquée... jusqu'en 1972, lorsque l'amirauté admit ce qu'elle avait toujours nié jusque là : le Lusitania transportait aussi une importante cargaison de munitions. 


(Coulé en 15 à 18 minutes, malgré les caissons étanches)

Si le coeur vous en dit, le site où se trouve encore l'épave est un peu à l'ouest de la pointe sud de l'Irlande.

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Le 01/09/1983, un boeing coréen de la KAL007 (Korean Air Line) volant vers Seoul, a été abattu par la chasse russe, à l'ouest de la presqu'île de Sakhaline. Il n'était arrivé là, en violant une partie importante de l'espace aérien soviétique, que par accident. C'était sous Ronald Reagan.


"Homo mendax".




met de deur in huis - d'entrée de jeu, de but en blanc...

...vous êtes dans le bain

Suite de notre rubrique bien aimée, "Les merveilleuses et innénarrables expressions de notre si belle et si riche langue française"
Aujourd'hui,
"Aller au diable vauvert"
"Dans le château de Vauvert on entendait des cris affreux, on y voyait des spectres traînant des chaînes, et entre autres un monstre vert avec une grande barbe blanche, moitié homme et moitié serpent, armé d’une grosse massue, et qui semblait toujours prêt à s’élancer la nuit sur les passants" du moins d'après la légende créée par un écrivain du XVIIIème siècle, alors que le château n'existait déjà plus depuis longtemps.

Vauvert vient de vallis viridis, verte vallée. Très loin de Paris, du moins du Paris enclos par l'enceinte de Philippe Auguste, très loin sur la route d'Orléans. Au XIème siècle, Robert le Pieux qui trouvait les lieux fort à son goût, y fit bâtir un château "magnifique".
Mais tout pieux qu'il était, Robert a répudié sa femme pour épouser sa cousine Berthe de Bourgogne, ce que ni l'Eglise ni sa famille n'entendaient permettre. Anathème papal, donc damnation éternelle pour le couple.
A la mort de Robert en 1031, le château se vide pour être repeuplé par une faune interlope qui détrousse les passants, vole le vin de la Montagne Ste Geneviève toute proche, utilise les carrières des environs comme planque pour le butin ; ce qui a rapidement donné fort mauvaise réputation au château.
Vers 1257 des moines s'installent dans le château après trois jours de procession et d'exorcismes, pendant une vingtaine d'années, après quoi ils s'installent dans la chartreuse qu'ils auraient - peut-être - bâties avec les pierres du château.
C'est la révolution française qui a eu raison des moines et de leur abbaye dont il ne reste que le logement des questeurs du sénat.
L'endroit qu'on appelait autrefois le diable vauvert est maintenant...
Le jardin du Luxembourg, en plein Paris.




Franchement on n'a pas perdu au change.

mardi 3 septembre 2013

"au bout de cinq à six semaines"

L'île de Lumière
est un navire affrété par Bernard Kouchner en 1979 pour sauver des milliers de vietnamiens perdus en mer de Chine. "Un bateau pour le Vietnam", c'est lui et tous ceux qui l'ont aidé à financer l'opération.

Le capitaine s'appelle François Herbelin (sur la photo, la grosse barbe), il n'a que 29 ans, c'est son premier commandement ; il est français ; Bernard Kouchner aussi, et aussi quelques membres de l'équipage ; mais les autres sont Hébridiens, Kanaks, Wallisiens ; le navire est requinqué par une cinquantaine de Chinoises et appartient à la compagnie des chargeurs calédoniens.


Le navire est rapidement transformé en hôpital et transporte des milliers de vietnamiens en lieu sûr.
Premier port : l'île malaise de Poulo Bidong où il sert d'hôpital pour les milliers de Vietnamiens qui sont entassés.
Après neuf mois il va patrouiller dans la mer de Chine pour y secourir les "boat people".
Sa dernière mission humanitaire : remonter le Mékong - il est le premier navire à le faire depuis la chute de Saïgon - jusqu'à Pnom-Penh pour ravitailler les Cambodgiens.
Une idée du trajet ? La voici.


Trois jours pour remonter le Mékong ; navigation uniquement diurne. Les vivres sont déchargés dans un Cambodge que les Vietnamiens viennent de délivrer des khmers rouges, et disparaissent.

C'est au cours de son premier voyage que le jeune capitaine Herbelin rencontre son épouse, une jeune réfugiée vietnamienne avec qui il a eu cinq enfants.
Des fois, les choses ne se passent pas si mal que ça.

sur chaude recommandation d'Elise

Bill Watterson, auteur de "Calvin et Hobbes" que vous connaissez sans doute, ce qui n'était quasiment pas mon cas.


On n'est pas plus chou, non ?

ça, ça l'est un peu moins.

L'auteur s'appelle Bill Watterson (en réalité William B. Watterson. Il est né en 1958 à Washington et son enfance s'est passée à Cleveland, dans l'Ohio.
Reuben Awards à trois reprises en 1986, 1988 et 1991 (le grand prix de la National Cartoonist Society).
Il met fin à sa carrière de cartoonist le 31/12/1995.
Sa série est extrêmement populaire : publié dans 2400 journaux; 30 millions d'album vendus.
La BD est pour lui un art; il refus la fabrication de produits dérivés que son éditeur lui impose, ce qui lui vaut une bataille juridique qu'il finit par gagner en 1990.
A ses yeux, la qualité l'emporte sur l'argent rapide ; c'est ainsi que sa série est peu commercialisée.
Hobbes a emprunté son nom à Thomas Hobbes, un philosophe du XVIIème siècle, et Calvin, au théologien protestant du XVIème siècle, Jean Calvin.
Les voici côte à côte.
                                  
Je vous laisse le soin de rendre à chacun d'eux son portrait.

Hobbes est né de l'observation du chat de Watterson ; comme son sport favori est le vélo, on retrouve le deux-roues régulièrement dans ses "cartoons".

Pour terminer, je vous donne la copie verbatim de la lettre par laquelle il annonce la fin de sa carrière publique.

Dear Reader:

I will be stopping Calvin and Hobbes at the end of the year. This was not a recent or an easy decision, and I leave with some sadness. My interests have shifted, however, and I believe I've done what I can do within the constraints of daily deadlines and small panels. I am eager to work at a more thoughtful pace, with fewer artistic compromises. I have not yet decided on future projects, but my relationship with Universal Press Syndicate will continue.

That so many newspapers would carry Calvin and Hobbes is an honor I'll long be proud of, and I've greatly appreciated your support and indulgence over the last decade. Drawing this comic strip has been a privilege and a pleasure, and I thank you for giving me the opportunity.

Sincerely,
Bill Watterson

Pour lui pas d'art majeur ni d'art mineur, mais simplement l'art.

En dessert, l'adresse du site que me recommande Elise: