lundi 9 juin 2014

de-bunking

" Il y avait beaucoup de mots qu’on ne pouvait plus tolérer et, en fin de compte, seuls les noms des localités avaient conservé quelque dignité. Il en était de même de certains numéros et de certaines dates. Avec les noms des localités, c’était tout ce qui avait encore un semblant de signification. Les mots abstraits tels que gloire, honneur, courage ou sainteté étaient indécents, comparés aux noms concrets des villages, aux numéros des routes, aux noms des rivières aux numéros des régiments, aux dates."
fm Ernest Hemingway, L'adieu aux armes (1929)
Paroles d'un jeune américain s'engage dans la Croix-Rouge italienne pour secourir les victimes de la première guerre mondiale.


  "J'ai dit que notre baptême du feu, à tous, fut une initiation tragique. Le mystère ne résidait pas, comme les non-combattants le croient, dans l'effet nouveau des armes perfectionnées, mais dans ce qui fut la réalité de toutes les guerres. Sur le courage, le patriotisme, le sacrifice, la mort, on nous avait trompés, et aux premières balles nous reconnaissions tout à coup le mensonge de l'anecdote, de l'histoire, de la littérature, de l'art, des bavardages de vétérans et des discours officiels. Ce que nous voyions, ce que nous éprouvions n'avait rien de commun avec ce que nous attendions, d'après ce que nous avions lu et tout ce qu'on nous avait dit...."
fm Jean Norton Cru, Témoins (1929)
Pour faire sa connaissance http://www.srlpleroy.net/biblio/cru.htm)


"Le sang de ces hommes, pourquoi fut-il versé, sinon pour des imaginations ? Nous vivons, nous mourons pour des rapports qui n'existent que dans notre esprit, et plus encore dans notre sensibilité. Nous vivons, nous mourons pour de l'invérifiable."
fm Henry de Montherlant, Chant funèbre pour les morts de Verdun (1925)

Creuser un abime entre les mots et les choses, c'est la propagande. L'inverse, c'est le "de-bunking"* : dégonfler, crever les baudruches, exposer le ridicule d'affirmations souvent pompeuses et toujours fausses.
Malheureusement l'un et l'autre sont aussi anciens que la parole.


* Ce que j'ai appris : BUNK
"Bunk" vient d'un petit comté de Caroline du Nord dont le représentant à la chambre, le sieur Felix Walker, s'était senti obligé de parler à la chambre, ce qui donna une intervention particulièrement creuse et pénible. Le comté s'appelle Buncomb ("County" bien sûr) qui est vite devenu Bunkum, abrégé en "bunk". Le représentant s'étant fait retendre les bretelles**  par ses pairs, il s'est tiré d'affaire en donnant l'explication ci-dessus.

** Pour votre gouverne : on remonte le pantalon en retendant les bretelles ; j'en suis encore à me demander comment on "remonte les bretelles" à quelqu'un. Quelque chose m'a sans doute échappé.

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