Fiat justitia et pereat mundus

L'histoire de Marvin Heemayer qui a inspiré Andreï Zviaguintsev a de lointains précédents que peu de gens ont relevés.

1. 1. Heinrich von Kleist dans son roman "Michael Kohlhaas" où un marchand de chevaux spolié par un jeune baron, lui déclare la guerre, sème la terreur dans le pays avec la complicité des paysans mécontents pour s'arrêter quand justice lui est rendue après intercession de Martin Luther soi-même.
   Sa devise : "Fiat justitia et pereat mundus.
2. Milos Forman dans son film "Ragtime".
3. Arnaud des Pallières qui reprend l'histoire de von Kleist en la situant dans les Cévennes.

Mais "Leviathan" possède une autre référence, déjà citée, celle du livre de Job, en quoi l'attitude de l'homme prend une autre dimension et une autre direction, que Thomas Hobbes n'avait pas prévue.

Quelques photos pour terminer ; rendez à chacun la sienne.

USA vs USSR

Grandby (CO) - USA - 2004 JUNE 04

M. Marvin John Heemayer (photo), céibataire, sans charge d'âme, monte dans son véhicule de travail et entreprend de démolir plusieurs bâtiments de la ville. Quelques heures plus tard, treize d'entre eux sont très endommagés (environ 50 millions de dollars de dégâts), aucun mort ni blessé, SAUF M. Heemayer lui-même qui a mis fin à ses jours.

Motifs ? Qui le dira ? Les avis divergent suivant les points de vue.
Suivant Andreï Petrovitch Zviaguintsev, réalisateur du film "Leviathan" qui en est inspiré, ce sont les mesures de représailles de M. Heemayer à l'encontre de la municipalité de Grandby qui l'a désavantagé dans un différend avec une grande entreprise de cimenterie.
Suivant un site plus officiel, c'est un "civil terrorist", anciennement soudeur et exploitant d'un magasin de silencieux pour voiture coupable plusieurs irrégularités dans une affaire de voisinage.

Le véhicule de M. Heemayer ? Un bulldozer de marque Komatsu 355A.

Un peu transformé il est vrai : airco, 3 caméras, une soufflerie pour en écarter la fumée, des provisons pour quelques temps, quelques pièces de blindage bien placées, la porte est soudée. Les munitions de la garde nationale appelée en renfort n'ont eu aucun effet sur le véhicule qui a continué son petit travail jusqu'à ce que les décombres accumulés l'empêchent de bouger.

Exit.

https://www.youtube.com/watch?v=PZbG9i1oGPA 

L'histoire avait commencé lorsque une cimenterie avait jeté son dévolu sur un terrain adjacent à celui de M. Heemayer, "en violation de ses droits constitutionnels" suivant plusieurs sites et M. Zviaguintsev lui-même.


Réflexion ?
M. Heemayer, en bon américain, est sûr de son droit ; comme la justice a tranché en sa défaveur, il a décidé de se faire justice lui-même.
Kolia (le protagoniste du film "Leviathan") est russe, la justice et le maire sont de mèche pour le dépouiller de son affaire : il perd son bien, sa femme, son fils et gagne quatorze ans de prison. Et il s'incline.
L'un et l'autre en appellent à Dieu, le premier pour justifier son action, l'autre pour lui demander raison de ce qui lui arrive.

D'où la question prémonitoire et sans doute éternelle de Vassili Grossman : " Les Russes ont-ils une âme serve ?"

Réponse personnelle: non, sinon il n'y aurait ni Dostoïevski, ni Grossman, ni Tolstoï, ni Sakharov, ni Soljenitsine, ni Zviaguintsev.

Conclusion de Andreï Zviatguintsev : "les Russes ont leur Leviathan, c'est l'état."

" Dieu est trop haut et le tsar trop loin ! "

(proverbe russe)

Grande première

Cet homme élégant, en uniforme de général s'appelle Homma Masaharu (本間雅晴). Il commandait les opérations dans le secteur des Philippines au début de la seconde guerre mondiale du camp japonais (Pearl Harbour c'était les 7-8 décembre 1941).

Brillant officier, a occupé différents postes diplomatiques en Europe, a servi dans le cabinet militaire de la maison impériale. Connu pour sa correction et son souci des prisonniers, et haï par certains de ses chefs et certains de ses hommes pour cette raison-même.

Le plus tragique dans son histoire, c'est sa relégation par le chef d'état-major Sugiyama à la tête de la 14ème Armée, en titre mais non en fait. Il avait pourtant remporté les batailles de Bataan (7-9/04/1942) et de Corregidor (5-6/05/1942). A la suite de la première bataille, aux Philippines, il aurait ordonné que les prisonniers soient contraints de remonter à pied vers un camp dans le nord de l'île : 78000 hommes (on en avait prévu environ 25000), 98 km sous une chaleur écrasante, sans boire et à peine manger, sous les coups, toujours au soleil en zone de malaria endémique. Environ un quart d'entre eux ne sont jamais arrivés.

Cholestérol ? diabète II ? Un seul traitement : les soudards nippons !)

Pourtant après la bataille de Corregidor, il a été relevé de son commandement en 1943, renvoyé au Japon pour manque de combativité où il a vécu jusqu'à la fin de la guerre en semi-réclusion.

En 1946, amené devant un tribunal militaire à Manille il a été condamné à mort et fusillé à Los Baños, dans l'île de Luçon, le 3 avril. En bon japonais et en digne officier, il a pris sur lui la responsabilité des horreurs commises par ses hommes, peut-être ou même sans aucun doute contre ses instructions formelles. Car si un chef désavoue son subordonné, les hommes du subordonné se sentent le droit d'en prendre à leur aise avec ses ordres.


C'est la première "marche de la mort" (死の行進) du nom. Elle a beaucoup été plagiée depuis lors !

Reconnaissance

Tous les Turcs ne nient pas les génocides.
Le professeur  Taner Akçam, d'origine turque, devenu allemand après son évasion de la prison centrale d'Ankara où il était détenu d'opinion (ce qui lui valait neuf ans de détention), et à ce titre parrainé par Amnesty International. Son délit : avoir créé un journal qui parle du traitement imposé aux Kurdes par le gouvernement turc.
Auparavant il avait déjà eu maille à partir avec la justice pour avoir protesté contre l'invasion de Chypre.
Diplomé de l'université d'Ankara, puis après sa fuite en Allemagne, de celle de Hanovre, il est aussi "visiting professor" de l'université du Minnesota et  membre du Strassler Family Center for Holocaust and Genocide Studies.
Inutile d'ajouter qu'il est très mal vu en haut lieu pour ses attaques contre la "turquité" (turkishness).
Un de ses amis, le journaliste Hrant Dink, ayant été abattu en 2007, il a demandé protection, entre autres à Nicola Sarkozy.
Tous deux ont toujours insisté sur la nécessité de reconnaître les génocides des minorités chrétiennes (arméniens, assyriens et grecs pontiques) pour remettre l'histoire à plat. Ajoutons que le prix Nobel de littérature Oran Pamuk a soutenu la publication de son livre sur le génocide arménien.

Photo

Berlin 15/03/1921

Des fois ça fait du bien de lire le journal, surtout celui du 15 mars 1921.

En haut un homme libre qui en a fait assassiner un million.

En bas un homme arrêté et jugé pour en avoir tué un seul.

En haut, Mehmet Talaat pacha, grand vizir de l'empire ottoman, un des huit responsables du génocide arménien.

En bas Soghomon Tehlirian, un des membres du commando chargé de les dessouder tous les huit, avec en outre mission de se faire arrêter et juger, ce qui aura lieu à Berlin, sous le régime de Weimar.

Le procès de l'assassin tourne à celui du vizir et Tehlirian est acquitté après deux jours de procès, sous les applaudissements de la foule.

Il faut dire que le régime de Weimar voulait prendre ses distances avec celui du 2ème Reich, celui de Guillaume II et de Bismarck, qui avait regardé ailleurs tandis que le régime "Jeunes Turcs" faisait le ménage.

Ajoutons que tous les hauts responsables du génocide arménien ont été retrouvés et éliminés.

Et que le mot "GENOCIDE" a été créé à l'époque et pour cette occasion par le juriste polonais Raphaël Lemkin. De lui aussi ce rapprochement entre la liberté du génocidaire et l'emprisonnement de l'assassin d'un seul homme.

Enfin, le nom de l'opération : Nemesis (en français: vengeance, en anglais : revenge).

 

 (fm A fish called Wanda)

REVENGE !

Pensée n° 139 Divertissement

" Quand je m'y suis mis quelquefois, à considérer les diverses agitations des hommes et les périls et les peines où ils s'exposent, dans la cour, dans la guerre, d'où naissent tant de querelles, de passions, d'entreprises hardies et souvent mauvaises, etc... j'ai découvert que tout le malheur des hommes vient d'une seule chose qui est de ne pas savoir demeurer en repos, dans une chambre. Un homme qui a assez de biens pour vivre, s'il savait demeurer chez soi avec plaisir, n'en sortirait pas pour aller sur la mer ou au siège d'une place. On n'achètera une charge à l'armée si cher, que parce qu'on trouverait insupportable de ne bouger de la ville ; et on ne recherche les conversations et les divertissements des jeux que parce qu'on ne peut demeurer chez soi avec plaisir.
Mais quand j'ai pensé de plus près, et qu'après avoir trouvé la cause de tous nos malheurs, j'ai voulu en découvrir la raison, j'ai trouvé qu'il y en a une bien effective, qui consiste dans le malheur naturel de notre condition faible et mortelle, et si misérable, que rien ne peut nous consoler, lorsque nous y pensons de près.
Quelque condition qu'on se figure, si l'on assemble tous les biens qui peuvent nous appartenir, la royauté est le plus beau poste du monde, et cependant qu'on s'en imagine, accompagné de toutes les satisfactions qui peuvent le toucher. S'il est sans divertissement*, et qu'on le laisse considérer et faire réflexion sur ce qu'il est, cette félicité languissante ne le soutiendra point, il tombera par nécessité dans les vues qui le menacent, des révoltes qui peuvent arriver, et enfin de la mort et des maladies qui sont inévitables ; de sorte qu'il est sans ce qu'on appelle divertissement, le voilà malheureux et plus malheureux que le moindre de ses sujets,qui joue et se divertit."

Pensées

Blaise Pascal (1623-1662)

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* de là le titre d'un roman de Jean Giono "Un roi sans divertissement".

PHILOSOPHIE : L’utopie délirante du transhumanisme | Lire pour croire…

PHILOSOPHIE : L’utopie délirante du transhumanisme | Lire pour croire…

Adieu IE

Et oui, tout passe, tout lasse, même internet explorer, et sa sécurité à trous.
Bienvenue, cet été avec Windows 10, à Microsoft Edge...qui est toujours Microsoft.

Sur la ligne de départ il y a donc, comme navigateurs Web, c'est-à-dire des moyens de lire des pages web; à ne pas confondre avec un navigateur internet qui permet bien d'autres choses, comme par exemple de téléphoner aux copains.

 IE (RIP)

Microsoft Edge

Safari

Firefox

Google +

Tous ces moyens vous suivent pas à pas et notent vos dits et vos écrits pour les vendre aux marchands.

HEURESEMENT IL Y A MIEUX

Certains moteurs de recherche ne vous pistent pas, comme par exemple

Et mieux encore
Certains versent une partie de leurs bénéfices à des organisations de votre choix (dans le choix qu'ils vous proposent, quand même), comme par exemple

Goodsearch

Un défaut : les organisations soutenues sont américaines)

Ecosia 

Allemand, la référence en Europe, verse 80% des revenus créés par la publicité (un clic sur une annonce) sur un fond de reforestation au Brésil.

Ecogine

dont le graphique ci-dessus vous donne le principe. Le mode de fonctionnement est le même que pour Ecosia.

10% des recettes vont à des organisations choisies avec les utilisateurs. C'est français et ça se voit.

Pour en savoir davantage, en mieux, trois noms, en ordre alphabétique :

Aurélien, Elise, Thomas.

Responsable, coupable ? Légalement, moralement ?

20 avril 2015 - Lüneburg.
Procès de Oskar Gröning, 93 ans, "le comptable d'Auschwitz."

70 ans plus tôt

Oskar Gröning a été SS ; la photo ne laisse aucun doute sur ce point. Sa fonction : comptable de tous les biens dont ont été dépouillées les victimes du camp. Etant donné qu'ill n'a pas de sang sur les mains, il plaide une culpabilité "morale mais non légale" et espère être acquitté.
Avant son départ pour sa nouvelle affectation, cet ex-employé de banque (ça ne s'invente pas), a écouté le briefing du major SS où on lui expliquait que "leur tâche n'était de toute évidence pas agréable, mais indispensable à la victoire finale", sans autre précision.
Le moyen de tenir pendant ses deux ans sur place de 1942 à 1944 ? La vodka. Et aussi le consentement, quel qu'en soit le motif (j'aurais sans doute - ou peut-être ? - fait comme lui).

Au début du procès, il fait la déclaration suivante, la seule que lui ait permise son avocat :

"I want to tell those deniers that I have seen the crematoria, I have seen the burning pits, and I want to assure you that these atrocities happened," he said. "I was there."

Sans doute, ou peut-être, un moyen de voir raccourcir la peine qui allait être requise contre lui. 
Un terrible argument contre son plaidoyer, c'est que tous étaient nécessaire dans cet horrible plan, même les petites mains et le personnel d'entretien. En faisant la comptabilité des biens volés, il soutenait l'économie de guerre, à sa façon.


Une chose est remarquable dans toute cette longue et atroce histoire : la conduite des autorités et de nombre d'intellectuels allemands, tels que Karl Jaspers, depuis lors. Bien des pays, nous tous sans doute, devraient en prendre de la graine.

"Heimat is verstehen und verstanden werden."

Karl Jaspers (1883-1969)

(ça nous console de Heidegger, pas vrai?)

PS Les renseignements nécessaires à la rédaction de ce blog ont été recherchés par le moteur "Goodsearch" qui reverse une partie respectable de ses gains à l'organisation de votre choix.

08/07/2015 Le procureur vient de requérir trois ans d'emprisonnement ; d'autres préfèrent l'astreindre à un travail d'utilité publique, comme d'aller témoigner dans les écoles. La suite au prononcé de la sentence.

Malleus maleficarum

Verso

 

Recto

En bon français "Le marteau des sorcières"
ce qu'il faut lire comme "Le marteau pour abattre les sorcières."

C'est - paraît-il -le premier livre qu'a permis d'imprimer l'invention de Gütenberg ; il a été écrit par deux spécialistes allemands, Heinrich Kramer et Jacob Sprenger, le second n'étant associé au premier que pour la promotion. Date de publication: 1487.

Il paraît que c'est sa tête 

 

Heinrich Kramer, prêtre à Insbruck, avait tenté de lancer une chasse aux sorcières, ce qui lui avait valu une expulsion du diocèse par l'évêque du lieu. Comme il croyait dur comme fer à l'existence des démons et de ses suppôts, il a entrepris d'écrire une défense de ses positions. Grand succès de librairie.

Condamné en 1490 par l'église catholique qui en considère le contenu comme un tissu de fariboles ("la sorcellerie existe bel et bien", "ceux qui n'y croient pas sont des faibles d'esprit", "les femmes sont prédisposées à sa pratique", "il y a des moyens d'identifier les sorcières...") mais soutenu par Innocent VIII*.

Pour l'église catholique c'est une redite (bis repetita placent, repetitio mater studiorum...pour ceux qui lisent) car le Canon episcopi de 900 avait déjà fait une mise au point, mais ni le sieur Kramer ni Innocent ne faisaient la littérature sans doute.

Mais adopté par bien des cours royales et des magistrats aux XVIème et XVIIème siècles. D'où des procès en sorcellerie bien lourds.

Si la chose vous intéresse, vous pouvez toujours vous le procurer sur Amazon à l'adresse suivante:
http://www.amazon.fr/s/ref=nb_sb_ss_c_0_8?__mk_fr_FR=%C3%85M%C3%85%C5%BD%C3%95%C3%91&url=search-alias%3Daps&field-keywords=malleus%20maleficarum&sprefix=malleus+%2Caps%2C238 .

Non, ce n'est pas une sorcière, c'est la marchande des quatre saisons de la rue Branque !

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Ce cher Innocent VIII a d'autres titres de gloire comme la confirmation de Torquemada à son poste, la traque des Vaudois, l'interdiction du livre de Pico de la Mirandola car 13 des 900 thèses qu'il contenait étaient hérétiques. Lui et quelques uns de ses prédécesseurs ont un carnet de vol assez chargé, mais qu'aurais-je fait à sa place et en son temps ?