" Je festoie et caresse la vérité en quelque main que je la trouve, et m'y rends allègrement, et luis tends mes armes vaincues, de loin que je la voie approcher. Et pourvu qu'on n'y procède d'une trogne trop impérieusement magistrale, je prends plaisir à être repris. Et m'accommode aux accusateurs, souvent plus, par raison de civilité, que par raison d'amendement : aimant à gratifier et à nourrir la liberté de m'avertir, par la facilité de céder " (III, 8, 1447)
" Toutefois il est malaisé d'y attirer les hommes de mon temps. Ils n'ont pas le courage de corriger, parce qu'ils n'ont pas le courage de souffrir de l'être ! Et parlent toujours avec dissimulation, en présence les uns des autres. Je prends si grand plaisir d'être jugé et connu, qu'il m'est comme indifférent, en quelle des deux formes je le sois. Mon imagination se contredit elle-même si souvent, et condamne, que ce m'est tout un, qu'un autre le fasse : vu principalement que je ne donne à sa répréhension, que l'autorité que je veux. Mais je romps paille avec celui, qui se tient si haut à la main : comme j'en connais quelqu'un, qui plaint son avertissement, s'il n'en est cru : et prend à injure, si on estrive [ = renâcle] à le suivre " (1447)
Tiré des Essais de Michel de Montaigne (prononcer MonAgne, car en langue d'oïl le i ne se prononce pas, dixit Michel Serres)
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